Même pas mâle ! la révolution clandestine
Format BrochéAuteur : Isabelle Alonso
Description
ENCORE MATERAZZI
Dimanche 3 septembre 2007, TF1, " Télé foot ". Interview de Materazzi, l'Italien qui se prit en plein thorax le coup de boule de Zidane. Materazzi avait insulté Zizou et c'est cela, plus que ses qualités de joueur, qui lui vaut son statut de star, si je comprends bien ce que raconte le présentateur. Materazzi publie son autobiographie et il veut être sûr de la vendre. Il nous révèle donc, après un insoutenable suspense, la teneur exacte des propos qui provoquèrent la regrettable réaction de notre héros national. Ça fait un an que les bruits les plus fantaisistes courent. L'Italien aurait traité Zizou de terroriste, aurait insulté sa mère, ou sa religion, ou sa race ( ?)... Devant le micro de la télé, Materazzi fait une tête de premier communiant, de bon garçon qu'a jamais mis les doigts dans la confiote, bouche en cur et regard candide. Il relativise l'importance de l'incident : " Je n'ai jamais tenu de propos racistes, je ne suis pas raciste. Je n'ai pas insulté sa mère, j'ai trop de respect... Quand Zidane m'a dit que je pourrais avoir son maillot après le match, j'ai juste dit : " Je préfère ta pute de sur... " Il est pas raciste, et il insulterait pas une mère, qui est quelqu'un de respectable. Nous voilà rassurés ! Mais une sur, même de Zidane, c'est pas grave, on peut y aller, c'est jamais qu'une gonzesse, y'a pas de quoi s'énerver.... Il est mignon.
À noter que Zidane est vraiment un taiseux. Gageons que s'il avait eu une répartie plus verbale que physique, s'il avait dit : " Tu risques pas de lui faire du mal... " ou " Elle s'intéresse pas aux petites bites " ou " Elle aime que les vrais mecs " ou " T'es pas pédé comme tous les Milanais ? ", bref décliner la remise en cause basiquement virile, peut-être que Materazzi se serait énervé, lui aurait mis un coup de boule et on serait champions du monde. Merde alors.
Il faudra bien qu'un jour " pute " ne soit plus une insulte (pédé non plus, d'ailleurs). Que la supposée sexualité d'une fille ne lui soit plus opposable, ne regarde qu'elle et ne serve pas de support à l'honneur de son frérot. Zidane dormirait tranquille, sa sur baiserait tranquille et Materazzi irait se faire foutre. Oh, pardon. Faudrait qu'un jour se faire foutre soit une activité libre d'opprobre, voire valorisée. Comme se faire foot.
CALVITIE PUBIENNE
L'esthétique porno s'impose au grand public. Mon esthéticienne me confiait il y a peu que les clientes se faisant intégralement tonsurer le mont de Vénus sont de plus en plus nombreuses. Même celles qui ne sont ni strip-teaseuses ni hardeuses trouvent du charme à l'arrachage pur et simple de " cette touffe de noir Jésus " chantée par Ferré en des temps immémoriaux où le sexe était savouré nature, avec frisettes d'origine. Misère. Déjà convaincues, c'est le mot, par la publicité, que nous malodorons du minou, voilà qu'également nous foisonnons du frifri au point qu'il faut aménager le carrefour, il manque de visibilité. Et c'est affublées d'un sexe de petite fille que nos déplumées se lancent dans la galipette...
N'en déduisez point que je sois une adepte du bikini à moustache, non. L'épilation maillot, aussi nécessaire qu'une bonne coupe de cheveux, permet une rectitude de jardin à la française, une pelouse impeccable, tirée au cordeau en attendant mieux. Pas de problème, au contraire. Mais dans la poilitude comme ailleurs, la modération s'impose. Il se trouve qu'à mon grand désarroi et à l'occasion d'une opération chirurgicale (bénigne, je vous rassure...), une infirmière armée d'un rasoir me pela jadis le pôle Sud. Ce qui me permit de constater de facto, de visu et de touchu que si la nature a prévu de nous agrémenter l'entre-deux d'un toupillon providentiel, elle a d'excellentes raisons. Il suffit d'en être dépossédée pour en prendre conscience. Exposé, le cur fendu se recroqueville, se renfrogne, s'irrite. S'enrhume. Perd de sa précieuse sensibilité. D'ici à ce qu'il leur pousse des durillons sous le string et des cors au clitoris, aux chauves de la motte, y'a pas loin.
La crinière isocèle c'est comme une petite couette qui protège, isole, préserve. C'est l'emballage du cadeau, le papier du bonbon, l'écrin du bijou. Le cadre du tableau, l'auréole du saint, l'atmosphère de la planète ! S'en amputer c'est trahir le désir. Le réduire à une exploration chirurgicale, un parcours fléché, lisse et sans surprise. Rassurant. Conséquence de la Grande Peur de la Foufoune, la mise à l'air de l'origine du monde désérotise le sexe beaucoup plus efficacement qu'un discours de Benoît XVI. Elle mutile l'imaginaire, prédigère les fantasmes et clôture la libido par la mise en évidence plutôt que par la mise au secret comme ce fut le cas pendant les siècles précédents, quand les bas-ventres se planquaient sous des feuilles de vigne et la bagatelle envoyait droit en enfer. Exhiber est parfois plus efficace que cacher.
L'offre des instituts de beauté a franchi des limites, de l'épilation maillot, à la banlieue de la foune, jusqu'à la brésilienne, extermination de tout poil devant-derrière exigeant une étape à quatre pattes dite de la " levrette en cire chaude ", fessier tendu vers la spatule tartinant l'il de Moscou jusqu'à éradication ultime de tout follicule pileux, si tu avances quand je recule, comment veux-tu que j' te follicule, chantent les esthéticiennes qui rêvaient d'une version plus glamour de leur joli métier. Entre ces deux extrêmes on trouve le ticket de métro, pour des transports contrôlés, la touffe teinte ou en forme de cur, choisie sur catalogue... Et voilà que les mecs s'y mettent ! Au rasoir, à la cire, au laser ! Ils s'attaquent à leur jungle intime, et se rasent les couilles, paraît-il. M'est avis qu'ils vont s'arrêter là. Le look uf dur, passe encore, mais ils n'iront pas plus loin. On peut espérer que le côté oisillon tombé du nid du service trois pièces privé de moumoute ne va pas beaucoup les motiver...
Le porno, avec son esthétique chirurgicale et son imagerie indigente, représente 65 % des connexions Internet. Excusez du peu. Ça donne une idée de la popularité de la chose, et de sa rentabilité. Un marché colossal et florissant. Pour l'exploiter, faut l'élargir. Pour l'élargir, faut le formater. C'est la loi du marketing. La mort du poil est le cheval de Troie du libéralisme en terrain érotique. Le signe de l'influence du porno sur la vie quotidienne et le petit commerce. On fait où on nous dit de faire, on baise orthodoxe, on jouit dans les clous. On est encore passé à un poil de la libération sexuelle...
Caractéristiques
Caractéristiques
- Format
- Broché
- Auteur(s)
- Isabelle Alonso
- Date de parution
- 28/02/2008